ISSN: 0041-4255
e-ISSN: 2791-6472

NEZİH FIRATLI

Neus avens essayé d’étudier ici l’ensemble des stèles funéraires grecques et romaines de Byzantion.. Pour cela nous avons divisé notre travail en deux parties : une étude détaillée des stèles et un catalogue où les 257 stèles funéraires et les 10 sarcophages de Byzantion sont répartis par types. Ainsi se succèdent les stèles ne comportant que des inscriptions, les banquets funèbres, les personnages debout, les personnages assis, les cavaliers, les représentations diverses et enfin les sarcophages. Nous ne donnerons dans cet article que le commentaire, mais nous avons reproduit un assez grand nombre de photographies pour chaque type de stèles. Nous y avons joint, d’autre part, deux planches reproduisant le plan de la ville (PI 1) et les emplacements des trouvailles (PI. 2) trois planches où sont dessinés les accessoires (PI. 3, 4 et 5).

Nous avons commencé notre travail en situant les lieux de découverte. La nécropole elle-même avait son centre à Beyazıt, mais le territoire de Byzantion s’étendait entre l’Ouest du Bosphore et une ligne passant par Terkos, Çatalca et Büyükçekmece. Toutes les stèles que nous étudions ici ont été trouvées à Istanbul dans des conditions connues et sont réunies aujourd’hui au Musée d’Archéologîe d’Istanbul sauf quelques-unes qui se trouvent dans d’autres musées ou dans des Collections privées.

Après avoir ainsi indiqué les lieux de trouvailles, nous nous sommes attaché à retracer l’évolution des formes des stèles. Elles sont soit en forme de face principale, soit en forme de face latérale d’un temple. Dans les deux types, les plus anciennes comprennent tous les détails. Ainsi celles en forme de face principale sont surmontées d’un fronton à deux rampants, orné de trois acrotères massifs Puis, peu à peu, les formes se sont simplifiées, les contours du fronton et des acrotères sont devenus un simple dessin en relief, indiqué sur les stèles par une surface unie de faible saillie. Par la suite, ce dessin luimeme a disparu complètement. Les stèles sont alors de simples blocs rectangulaires avec une représentation en relief sur un champ plus ou moins profondément ravalé. Les stèles en forme de face latérale ont évolué de la même façon pour devenir de simples blocs rectangulaires. Quant aux inscriptions, dans la série des stèles à fronton, elles sont placées sur l’architrave, ou réparties sur la partie supérieure de la stèle. Dans les pierres en forme de face latérale d’un temple, elles sont gravées sur l’architrave. Dans les deux séries, l’inscription est parfois gravée aussi à la partie inférieure.

Les accessoires ont une grande importance dans l’étude de nos stèles funéraires. Nous avons ainsi été amené à remarquer que les accessoires, sculptés généralement sur un bandeau à la partie supéri-eure de la stèle, changent selon le sexe du défunt et que les mêmes accessoires se retrouvent sur presque toutes les stèles. Ainsi, sur une stèle destinée à la fois à un hemme et à une femme, on verra à la partie supérieure: au-dessus de l’homme (à droite généralement), un groupe de trois volumes, un sac, des tablettes, un encrier; audessus de la femme (à gauche généralement), des flacons à parfums, une corbeille à laine, un miroir, un peigne, un coffret à bijoux. Si la stèle n’est destinée qu’à un homme, elle ne comportera que les attributs d’un intellectuel, si elle est dédiée à une femme, on n’y retrouvera que des objets nécessaires pour la toilette. De même, à côté de l’homme se tient toujours un petit garçon debout dans une attitude méditative, tandis que près de la femme se trouve toujours une fillette tenant parfois un coffret à bijoux ou une corbeille à laine. En dehors de ces accessoires que l’on retrouve sur presque toutes les stèles, nous en avons trouvé certains tout à fait particuliers. Ainsi sur deux stèles sans doute pour des marins (Nos 35 et 189, Pl. IX) est représentée une proue de navire. L’une, le No 189, comporte, en dehors de la proue de navire, un ceinturon et un sabre, le défunt étant probablement un militaire. Enfin deux autres stèles ont particulièrement retenu notre attention. La première (No 33, Pl. VIII) est une stèle de grande dimension ressemblant à un banquet funèbre. Au-dessus de l’homme couché, les accessoires ordinaires réservés aux hommes. Au-dessus de la femme assise à son chevet, les accessoires féminins. Mais, en plus, l’homme tient une baguette qu’il appuie sur une boule. D’autre part, dans l’angle supérieur gauche, au-dessus des caryatides, est sculpté un cadran solaire. L’attitude de l’homme s’appuyant sur le globe céleste et le cadran solaire laissent supposer qu’il s’agit d’un philosophe. La seconde stèle (No 188, Pl. XXII) ne comporte aucune représentation humaine. Mais elle est dédiée à un homme puisqu’on y retrouve tous les accessoires masculins habituels : encrier, volumes, sac, tablettes. D’autre part, le relief représente, d’un côté le globe céleste (comme dans la précédente), surmonté de l’attribut d’une déesse lunaire, au centre une grande palme, et à gauche un strigile, une couronne et une torche. Ce qui nous a amené à conclure qu’il s’agit ici d’un jeune intellectuel, sportif, victorieux dans une course à la torche.

Nous avons ensuite étudié les stèles d’une manière typologique, en suivant l’ordre du catalogue. Viennent d’abord les stèles ne com-portant que des inscriptions dont Μ. Louis Robert, Professeur au Collège de France, a bien voulu se charger. Les inscriptions sont simples, elles désignent le ou les morts pour lesquels les stèles ont été faites, le nom des parents et parfois des regrets. Mais les noms et la forme des lettres permettent de dater les stèles. Vient ensuite la longue série des “banquets funèbres”. L’attitude des personnages y est toujours la même : un homme (rarement deux) est étendu sur une kliné. D’une main il tient une couronne qu’il tend vers la femme assise près du lit. Cette attitude est caractéristique pour Istanbul. Dans l’autre main, l’homme tient une coupe Des petits serviteurs pensifs sont placés à droite et à gauche. Devant le lit rituel est dressée une table, la mensa tripes Et c’est au sujet de cette table qu’il existe certaines différences entre les banquets. Le plus souvent des mets destinés au repas funèbre sont disposés sur la table. Mais parfois les mets sont remplacés par un volumen. Nous avons constaté alors que, dans ce cas, le faisceau de volumens placé à la partie supérieure de la stèle (au-dessus de l’homme) ne comprend plus que deux volumens au lieu des trois sculptés habituellement. Les “banquets funèbres” sont plus ou moins riches selon le nombre des personnages, la grandeur de la stèle, les décorations entourant la stèle, comme par exemple pour la stèle du philosophe (No. 33) dont nous avons parlé plus haut. Cette forme de stèle a été de loin la plus employée à Byzantion, comme du reste partout ailleurs. Mais nous avons aussi dans notre groupe un certain nombre de stèles représentant des personnages debout. Pour le plus grand nombre il s’agit d’un homme drapé, le bras droit replié sur la poitrine. Près de lui se tient un petit serviteur. Quand il s’agit d’une femme, elle est drapée dans un himation relevé sur la tête, un bras replié sur la poitrine, écartant son voile de la main. Près d’elle se tient soit une petite servante, soit une grande personne (ami ou parent) et une ou deux servantes. Nous avons étudié ensuite les stèles représentant un personnange assis, généralement une femme. Deux des plus belles de ces stèles sont les Nos 167 et 251 (Pl. XXIV) du catalogue Elles sont sculptées sur un fond profondément ravalé et limité à droite et à gauche par un pilier surmonté d’une caryatide supportant l’en-tablement. La femme, drapée dans un himation est assise de face dans un fauteuil très ouvragé. A droite une fillette tient un éventail. Dans ce groupe de stèles, il y a deux sortes d’attitudes : ou bien la femme est assise de profil et serre la main d’une personne debout devant elle, ou bien elle est seulement entourée d’une ou de deux petites servantes qui lui présentent soit un miroir, soit un coffret à bijoux. Le restant des stèles est constitué par des représentations diverses et des fragments. Parmi celles-là cinq stèles représentent des cavaliers. Sur l’une d’entre elles, le cavalier a tout à fait l’attitude du cavalier thrace (P. XVIII/36). Enfin notre série compte dix sarcophages décorés de reliefs en forme de stèles (Pls. XXV, XXVI).

D’après cette étude, nous pouvons conclure que les stèles funé-raires de Byzantion ont continué pendant une période allant du IVe siècle avant J-C. jusqu’à la fin du paganisme, soit approximativement à la fin du IIIe siècle après J-C. Il est possible de les dater, d’après l’inscription comme nous l’avons dit plus haut, d’après la forme de la stèle et d’après le relief. Pour la forme, nous avons constaté que les plus anciennes sont les plus soignées, puis avec le temps la forme dégénère et se simplifie. Le relief nous renseigne aussi sur la date: ainsi les plus anciennes sont des stèles attiques importées dont le matériel lui-même n’est pas non plus d’Istanbul. Puis, comme pour la forme, on constate aussi à l’époque romaine, une dégénérescence du travail et une simplification de plus en plus marquée.